- Théophile Gautier (1811-1872)
Extrait du Recueil : España
« Sur le Guadalquivir, en sortant de Séville,
Quand l’oeil à l’horizon se tourne avec regret,
Les dômes, les clochers font comme une forêt :
A chaque tour de roue il surgit une aiguille.
D’abord la Giralda, dont l’angle d’or scintille,
Rose dans le ciel bleu darde son minaret ;
La cathédrale énorme à son tour apparaît
Par-dessus les maisons, qui vont à sa cheville.
De près, l’on n’aperçoit que des fragments d’arceaux :
Un pignon biscornu, l’angle d’un mur maussade
Cache la flèche ouvrée et la riche façade.
Grands hommes, obstrués et masqués par les sots,
Comme les hautes tours sur les toits de la ville,
De loin vos fronts grandis montent dans l’air tranquille ! »
- Alphonse Cordier
Extrait de A travers la France, l’Italie, la Suisse et l’Espagne.
« La capitale de l’Andalousie a conservé une partie de son caractère ancien ; elle a, comme Cordoue, des rues étroites et tortueuses, mais moins propres, parce qu’elles sont plus accessibles aux voitures et beaucoup plus commerçantes. Les maisons, à deux ou trois étages, sont, pour la plupart, d’un bel
aspect et ont des miradores, ou balcons vitrés en saillie sur la rue. Le caractère le plus intéressant de Séville et celui qui rappelle le mieux le type arabe, c’est l’existence presque générale de patio. (…)
La grande merveille de Séville, c’est sa cathédrale, avec son beau transept et sa haute tour, la fameuse Giralda dont tous les Sévillans sont si fiers. (…) Cette statue est installée de manière à pouvoir tourner sur elle-même au moindre vent ; elle sert de girouette ; c’est la Giralda proprement dite, et c’est elle qui a donné son nom à tout le monument »
- III.Alexandre Dumas (1802-1870)
Extrait de Paris à Cadix
«Nous venions d’apercevoir la Giralda.
La Giralda, madame, c’est la première et la dernière chose qu’on voit à Séville, et elle a certes sa grande part du proverbe : « Quien ne ha visto a Sevilla, ne ha visto a maravilla. » C’est-à-dire, « Qui n’a pas vu Séville n’a pas vu une merveille ». En effet, le voyageur s’approche de chaque ville attiré par son aimant particulier : Florence a son vieux palais, Pise son Campo-Santo, Naples Herculanum et Pompéi, Grenade l’Alhambra, Cordoue sa mosquée. Séville a la Giralda. Certes, il y a peu de maîtresses de roi, et même de maîtresses de poète, pour lesquelles il ait été fait autant de vers que pour cette sultane de granit. (…) ;
A mesure que nous approchions de Séville, les cactus et les aloès, un instant oubliés, semblaient renaître ; ces énormes végétations, abritées de temps en temps par l’ombre d’un palmier, donnent aux plaines un aspect de splendeur inouïe ; enfin, comme pour ajouter un suprême caractère au paysage, à gauche de la route s’élève un de ces aqueducs comme on en voit courir par fragments isolés dans ce magnifique désert qu’on appelle la plaine de Rome. Au reste, une lieue avant Séville,
Séville est déjà Séville, c’est-à-dire la ville du bruit, de l’animation, de la lumière. (…);
La Christina est la promenade fashionable de Séville, ses Tuileries, ou plutôt ses Champs-Élysées. Elle a quelque chose de la promenade de Chiaja, à Naples. (…)
La Tour d’or est un édifice à trois étages disposés en recul ; elle est crénelée à la mauresque, et fait admirablement dans le paysage, bâtie qu’elle est sur la rive du Guadalquivir, dont l’eau vient baigner sa base. »
- IV.Charles Monselet (1825-1888)
Extrait de De Montmartre à Séville
« Je m’en voudrais de ne pas vous écrire du pays de Figaro, de cette Séville si jolie et si fameuse. C’est un pèlerinage que vous devriez exiger de tous vos rédacteurs (…)
Rien n’y paraît guère changé depuis Beaumarchais et depuis Rossini ; ce sont les mêmes rues, les mêmes arcades, les mêmes maisons. (…)
Ce qui, heureusement, promet de ne point disparaître sitôt, c’est l’Alcazar, si délicatement restauré et si soigneusement entretenu qu’il semble abandonné de la veille seulement pas se hôtes légendaires, ses princesses voilées, ses califes rêveurs. (…)
Extérieurement, la cathédrale de Séville, où tous les styles se heurtent, n’a rien de saisissant ; intérieurement, c’est autre chose. La grandeur et la richesse y donnent une note suprême, même après Cologne et Milan. Il y a de quoi s’extasier pendant huit jours. Seules, la tour de la Giralda m’a tenu béant d’admiration toute une matinée ; encore y suis-je revenu le soir, par le clair de lune. »