- Chateaubriand (1768-1848)
Extrait de Itinéraire de Paris à Jérusalem
« L’Alhambra me parut digne d’être remarqué, même après les temples de Grèce. La vallée de Grenade est délicieuse et ressemble beaucoup à celle de Sparte : on conçoit que les Maures regrettent un pareil pays. »
Extrait de Mélanges littéraires
« Les palais de Grenade nous ont intéressé et surpris, même après avoir vu les mosquées du Caire et les temples d’Athènes. L’Alhambra semble être l’habitation des Génies : c’est un de ces édifices des Mille et une Nuits que l’on croit voir moins en réalité qu’en songe. On ne peut se faire une juste idée de ces plâtres moulés et découpés à jour, de cette architecture de dentelles, de ces bains, de ces fontaines, de ces jardins intérieurs, où des orangers et des grenadiers sauvages se mêlent à des ruines légères. Rien n’égale la finesse et la variété des arabesques de l’Alhambra. (…)
Quelque chose de voluptueux, de religieux et de guerrier fait le caractère de ce singulier édifice, espèce de cloître de l’amour, où sont encore retracées les aventures des Abencérages ; retraites où le plaisir et la cruauté habitaient ensemble, et où le roi maure faisait souvent tomber dans le bassin de marbre la tête charmante qu’il venait de caresser. On doit bien désirer qu’un talent délicat et heureux nous peigne quelque jour ces lieux magiques. »
- Alphonse Cordier
Extrait de A travers la France, l’Italie, la Suisse et l’Espagne.
« Nous étions sous les murs mêmes de cet illustre Alhambra, de ce merveilleux palais arabe qui fait la gloire de Grenade et qu’on vient visiter de tous les coins de l’univers ! (…) Comment parler de l’Alhambra, après tout ce que Chateaubriand et tant d’autres écrivains en ont dit ? Tout le monde, en effet, connaît la cour des Myrtes, avec son long réservoir pavé en marbre ; la cour des Lions, avec ses galeries et ses portiques (…) ; la salle des Deux-sœurs, dont la voûte, arrondie comme une moitié d’orange, est un miracle de travail et de patience ; la salle des Abencérages, avec son bassin de marbre (…) ; la salle du Tribunal, avec ses peintures arabes, les seuls qui soient parvenus jusqu’à nous ; enfin la salle des ambassadeurs, qui est la plus belle de tout l’Alhambra ! (…) Son enceinte muraillée, ses tours, ses portes, ses jardins, sa position élevée, dominant presque toute la ville, tout cela a un grand air de féodalité, qui rappelle le Moyen-Âge et fait très bien dans le tableau de Grenade ! (…)
Je suis descendu dans la vielle qui est une des plus curieuses de toute l’Espagne, autant par les souvenirs historiques qui s’y rattachent que par la bizarre architecture des ses nombreux édifices publics. Les rues en sont étroites et tortueuses, comme dans toutes les villes d’origine mauresque (…) Il y a d’assez belles places et de superbes promenades, plantées d’arbres surtout celle qu’on appelle le Salon et qui se trouve sur les bords du Genil. »
- III.Victor Fournel (1829-1894)
Extrait de A travers l’Espagne et l’Italie
« Jamais je ne me suis senti aussi perdu et abandonné que dans cette immense Grenade (…) Assise sur trois collines, elles comprend en réalité trois villes distinctes, sans parler de la ville entièrement moderne, qui s’étend dans la vallée. Des Tours-Vermeilles à L’Alhambra, l’ancienne résidence des rois maures, et à L’Albaycin, quartier général des gitanos, c’est tout un voyage.
Je suis logé dans l’intérieur de l’Alhambra. (…) L’Alhambra n’est pas seulement un palais, c’est vraiment une ville, comme je viens de le dire, une ville renfermant dans son enceinte, outre la merveille si souvent décrite, peinte et chantée, qui semble avoir été construite par les génies, de vastes promenades, des bois, des places, des maisons de gens du peuple et des villa princières, enfin des hôtels comme celui où je suis descendu »
Il faut plus d’un quart d’heure pour descendre, par la magnifique avenue bordée d’ormes gigantesques, à la porte de las Grenadas, et l’on n’est encore, à ce point, qu’à l’une des extrémités de la ville. »
- IV.Victor Hugo (1802-1885)
Extrait du poème Orientales, 3-5 avril 1828.
« Soit lointaine, soit voisine,
Espagnole ou sarrasine,
Il n’est pas une cité
Qui dispute sans folie
A Grenade la jolie
La pomme de la beauté,
Et qui, gracieuse, étale
Plus de pompe orientale
Sous un ciel plus enchanté (…)
L’Alhambra ! L’Alhambra ! Palais que les Génies
Ont doré comme un rêve et rempli d’harmonies,
Forteresse aux créneaux festonnés et croulants,
Où l’on entend la nuit de magiques syllabes,
Quand la lune, à travers les mille arceaux arabes,
Sème les murs de trèfles blancs !
Grenade a plus de merveilles
Que n’a de graines vermeilles
Le beau fruit de ses vallons ; »
- V.Gustave Doré et CH. Davillier
Extrait du Voyage en Espagne
« Hâtons-nous de dire que les rues de Grenade, si elles ne rappellent pas tout à fait l’Orient, sont bien loin d’être d’un aspect monotone : les maisons, peintes en rose tendre, en vert clair, en jaune beurre frais, et autres nuances des plus douces, se colorent au soleil des couleurs les plus gaies.
« Elle peint ses maisons des plus riches couleurs», a dit Victor Hugo; on ne saurait être plus vrai. Chaque fenêtre est garnie de longues nattes de sparterie abritant un balcon, d’où pendent, luxuriantes et touffues, des plantes grasses aux fleurs écarlates. Quelquefois des tendidos, vastes toiles aux rayures bleues et blanches, forment au-dessus des rues un toit transparent, comme dans certaines de nos villes du midi. »